Tu sais, j’aimerais te dire de ne pas y aller et de faire attention à toi. Mais la vérité dans tout ça, c’est qu’on regrette toujours ce qu’on n’a pas vécu.
J’aimerais te dire aussi de croire au meilleur et de ne pas voir le mal partout.
Je ne te jugerai pas de rester dans une relation qui ne te convient pas.
Les larmes se mélangent aux éclats de rire tout comme les colères noires se transforment en nuit d’amour.
Tu sais, je te comprends.
Toi aussi, tu veux l’apaiser et lui correspondre au mieux selon ses attentes.
Du jour au lendemain, tu deviens son tout jusqu’au jour où, comme moi, tu ne seras plus rien. Tu seras ce fantôme encombrant qu’on enferme dans un placard et qu’on ne voudra plus jamais voir.
Profite des instants de bonheur. Des moments de confiance et de sérénité où tu penseras que c’est l’homme de ta vie.
Ne fais pas la guerre à ton entourage et ne les force pas à l’aimer. Personne ne pourra voir en lui ce que tu vois.
L’emprise psychologique qu’il exerce sur ton quotidien t’aveugleras de plus en plus.
Cet homme si charmant du début que tu pensais être fait pour toi ne restera pas.
Mais ce que tu vis existe.
J’aimerais te tendre la main aux premiers mots rabaissants. J’aimerais te montrer ce chemin que je n’ai pas suivi, celui où tu pars sans jamais regarder en arrière.
Mais tu ne partiras pas parce que dans le fond, tu penseras que c’est de ta faute et que tu mérites d’être traitée comme ça.
J’aimerais que tu ne t’habitues pas au charme pervers de la violence. J’aimerais que tu comprennes que ce n’est pas normal et que l’amour ne se donne pas pour mieux être repris. Tu n’as pas à te battre pour un amour inconstant. Tu n’as pas à vivre dans la peur de le perdre sans cesse.
Les nuits à pleurer sont ton quotidien. Les angoisses de mal faire le sont aussi. Mais fais attention à toi et surtout, protège-toi.
Les autres ne te comprendront pas. Mais dans le fond, toi-même tu ne te comprends plus.
Puis arrivera ce moment où tu ne te reconnaitra plus. Tu ne seras jamais bien, peu importe où tu te trouveras. La peur permanente de ses excès te maintiendra. Mais ce qui te maintiens ce n’est pas l’amour, ce n’est que de la survie.
Tu voudras pleurer et exploser. Peut-être même que tu le frapperas. Mais tu finiras toujours par croire qu’il changera. Tu lui promettras de changer, toi, et de faire des efforts pour lui et pour votre couple. Tu lui promettras quantité de choses que tu ne tiendras pas. Parce qu’au plus profond de toi, tu le sais très bien : tu n’as pas à changer et tu n’y es pour rien.
Tu arriveras à rire de tes bleus sur les bras. Tu te diras sans doute que ce n’est rien et que c’est le prix à payer pour vivre une passion digne de ce nom.
Et puis parfois, tu auras peur. Les mains autour de ta gorge ne sont pas anodines et tu le sais. Mais comme une condamnée tu dormiras dans les mêmes draps que ton bourreau.
Tu le regarderas dormir et en silence tu pleureras seule dans ton malheur et incapable de te prendre en main.
Car tu penseras que tu n’es qu’une bonne à rien et qu’il est le seul à voir du bon en toi.
Tu t’accrocheras aux mots d’amour. Tu t’accrocheras au meilleur. Mais sa noirceur refera surface. Tu auras beau te persuader du contraire la prochaine crise ôtera tous tes espoirs.
Tu aimerais fermer la gueule aux autres qui te jugeront. Tu ne pourras pas. Les clichés sont tenaces. Combien de fois j’ai pu dire : « à la première claque je partirai »… Encore faut-il réellement le comprendre, au moment où tu le vis, qu’il s’agit d’une claque.
MH

Photographie d’une haute fenêtre brisée et taguée de rouge. Vue depuis l’intérieur, lumière de soleil couchant au dehors, ciel clair, ont voit une maison en contre-plongée.
Illustration par Carolyne Missdigriz
https://missdigriz.com
Un des plus beaux texte que j’aie jamais lu. J’en ai pleuré. Merci.