Il a toujours été entre deux avec moi, ce frère.
A m’adorer, et me détester en même temps. Une sorte de jalousie à mon égard, moi la jeune soeur, mais il aurait tué le premier qui m’aurait emmerdée.
Il m’a frappée ce frère. Souvent. Quand nous étions seuls, pour un rien, et personne ne le voyait. J’avais peur de lui, peur de cette violence, moi aussi il m’aurait tuée. Je me souviens de ces bagarres, de sa force qu’il ne contrôlait pas, de la transpiration, de l’adrénaline quand le coup allait tomber, des bras rougis par l’effort. Je l’ai haï.
Et puis, une fois la colère passée, il s’excusait, je n’arrivais plus à lui en vouloir, et je pardonnais. Ça a duré longtemps. Puis on a grandi, il ne pouvait plus. J’étais devenue quelqu’un, une femme, c’était plus délicat d’en venir aux mains, j’ai cru que c’était fini. Mais il y a deux ans, ça a recommencé, c’était le jour de Noël, et il m’a frappée violemment. Je ne pouvais pas le croire. C’est humiliée et en larmes que je suis allée déposer une main courante contre ce frère, un 24 décembre. Nous ne nous sommes plus parlé pendant six mois, puis j’ai pardonné, encore.
Aujourd’hui je ne sais plus si ce qui s’est passé est normal. Si il avait raison, si je l’avais cherché. Tout est flou, je ne sais plus si ma souffrance est légitime. Aujourd’hui j’ai pardonné, et je tuerais pour ce frère.

G.C.

ce frere

Illustration par AHenry