Lorsque j’ai su que j’étais enceinte, mon ami et moi voulions vivre cette grossesse et l’arrivée de notre bébé à 200%.
Nous avons choisi l’haptonomie comme préparation à l’accouchement, ce qui nous a permis de créer un lien extraordinaire avec cette petite puce qui grandissait dans mon ventre. Nous voulions l’accueillir avec autant de douceur que celle dont nous l’avions entourée pendant neuf mois.
J’ai commencé à avoir des contractions la veille du terme annoncé. Un monitoring était prévu ce jour-là ; la sage-femme a remarqué que même si les contractions n’étaient pas encore fortes, son cœur faiblissait. Les contractions ont continué à s’intensifier le soir.
Nous nous sommes décidés à aller à la mater, il était 2h du matin. J’étais très calme et je souhaitais me rendre à la maternité le plus tard possible pour ne pas risquer d’être prise dans un tourbillon médical.
La sage-femme a constaté une arythmie. Elle a réussi – à ma demande – à me mettre le monito de façon à ce que je puisse bouger, car j’avais remarqué qu’en restant debout ou assise, le cœur de ma fille reprenait un rythme normal. Je ne voulais donc pas qu’on m’oblige à rester allongée. À 8h du matin, toujours sur le ballon, agrippée aux genoux de mon ami, je supportais les contractions et mon col s’était ouvert à six. Je devais tenir, je n’avais pas le choix car dès que je m’allongeais, son cœur rechutait.
Et puis à 10h, changement d’équipe, et là, tout a basculé.
La nouvelle sage-femme a décidé de me percer la poche pour que ça avance plus vite et que ma fille descende car elle était encore bien haute. J’ai accepté, je n’aurais pas dû. J’étais épuisée, je n’ai pas eu le courage de lui tenir tête. Elle a donc percé la poche mais ma fille n’est pas plus descendue. Nous l’avons encouragée mais elle devait être aussi crevée que moi. Mon col s’est rétracté. J’ai essayé de tenir mais à 11h, j’ai demandé la péridurale donc je me suis allongée… Son cœur a recommencé à chuter pendant les contractions. La sage-femme n’était absolument pas présente. Elle m’a mis de l’ocytocine mais la seringue était bouchée, ça n’arrêtait pas de sonner. La sage-femme venait, regardait la seringue, tapait dessus et repartait sans rien dire. Elle ne s’est rendu compte qu’elle était bouchée qu’un peu plus d’une heure après…
Puis sans rien nous dire, elle m’a mis une sonde urinaire et rapidement le gynécologue est arrivé.
Nous avons alors compris. Je crois leur avoir dit d’attendre mais ni la sage-femme ni le gynéco n’ont voulu m’écouter. J’étais en larmes, mon compagnon aussi. L’équipe n’a pas voulu que mon ami vienne avec moi. Je suis entrée au bloc en larmes. L’infirmier anesthésiste m’a soutenue, le seul. Il m’a rassurée, m’a donné la main mais mon ami était de l’autre côté.
Quand la sage-femme m’a apporté mon bébé je n’ai pas pu la toucher, elle était trop haute. Je n’arrivais pas à lui faire un bisou. Elle pleurait mais allait très bien. Elle était belle. Mais on ne l’a pas mise sur moi pour que je la tienne dans mes bras. J’ai dû attendre deux heures pour vivre ce moment-là.
Je lui ai dit qu’elle allait retrouver son papa. À ce moment, elle a arrêté de pleurer et m’a regardée puis la sage-femme est partie avec elle. Je crois que j’ai dû m’endormir. Je me rappelle sortir du bloc et arriver en salle de réveil. Là, j’étais en face de la pendule et je regardais les minutes passer. J’avais très froid. On m’avait dit que ma fille et son papa allaient me rejoindre alors je luttais pour ne pas m’endormir… Et ils sont enfin arrivés. J’ai eu peur de la prendre car je tremblais mais son papa m’a rassurée. Elle s’est endormie dans mes bras.
La nuit qui a suivi, je n’ai pas dormi non plus. L’infirmière l’a installée dans mon lit pour que je puisse lui donner le sein à la demande. Il fallait que je rattrape quelque chose… Et nous avons heureusement été très bien entourés par les infirmières du service.
Je me demandais si j’étais vraiment sa maman. Je savais que c’était ma petite fille. Grâce à l’haptonomie, c’était comme si je la connaissais depuis neuf mois déjà mais est-ce que j’étais sa maman ? N’ayant pu l’embrasser à sa naissance, je n’avais pas pu marquer notre lien.
J’étais en colère contre la terre entière, mon compagnon aussi… Nous avons beaucoup pleuré. Il voulait s’entretenir avec la responsable du service pour lui signifier l’incompétence et la maltraitance de la sage-femme qui était présente le matin de mon accouchement mais je n’ai pas voulu. Je le regrette maintenant. Face à des « professionnel.le.s » je n’osais pas, comme si ce mépris que nous avons subi était normal.
Après trois ans, j’ai toujours l’impression qu’on m’a volé mon accouchement, que l’équipe m’a laissé tomber. Dès le changement du matin, la nouvelle équipe a voulu que ça aille vite et en finir non pas pour moi mais pour elle ! Je voulais accompagner ma fille à naître jusqu’au bout et je n’ai pas réussi. C’est peut-être étrange, mais je voulais la sentir naître.
Il m’est toujours difficile de dire que le plus beau jour de ma vie est le jour de sa naissance. Je dirais plutôt que ce jour-là, il s’est passé ce qu’il y a de plus beau dans ma vie : sa naissance ; et qu’il s’est également passé quelque chose de très traumatisant pour moi : la façon dont elle est née.
Après plusieurs mois, j’ai obtenu mon dossier médical : absolument rien dedans ne mentionne une quelconque souffrance fœtale. L’équipe a donc décidé la césarienne pour son propre confort.
Nous souhaitons avoir un deuxième enfant. Je suis – bien avant sa conception – hantée par la césarienne. Je cherche les lieux qui sont vraiment à l’écoute des couples. La réalité en France est que très peu de professionnel.le.s acceptent de prendre le risque d’un accouchement physiologique après une première césarienne. Mais je vais chercher, je ne lâcherai pas.
À Paris, le 2 mai 2016
Marie

Dessin au crayon : Une sainte dont le bas de la toge se transforme en tentacules de pieuvre. Le dessous des tentacules est rouge. Elle a le visage serin et les mains ouvertes vers l’extérieur. Sur sa poitrine, un cœur rouge.
Illustration par N.O.
Encore des parents non respectés, une mère infantilisée… Quel triste témoignage! Je comprends très bien ce que vous avez vécu. Combien de témoignages de ce genre faudra-t-il pour que le corps médical se remette en question ?!
Bon courage à ces parents. Un AVAC est encore possible, je vous souhaite de trouver les bonnes personnes pour vous accompagner.
Je peux vous indiquer des noms de sage femmes et gynécologue pour vous accompagner pour un AVAC. Contactez-moi si vous le souhaitez
Bonjour,
Votre témoignage résonne très fort en moi car nous avons le même parcours pour notre fils Zack né en octobre 2014…
Prepa hapto czr désire d’accouchement à la maison en première intention, puis suivie en SF libérale et prise en charge dans une mat’ de niveaux deux formé Béatrice de Gasquet. Malgré tout, 18h de travail, puis épuisée ils m’ont convaincu de !!2!! Péridurale puis une césarienne et rien qui ne le justifie ensuite dans le dossier… au final 6h en salle de réveil avant de voir mon fils… un lien pas bien fait qui nous à éloignés quelques mois. Heureusement maintenant avec bcp d’amour et de patience tout est rentré dans l’ordre, merci l’allaitement! Bon courage à vous