On n’a pas le droit d’être en tort. C’est forcément notre faute, on n’a pas su dire non. Il m’a touchée, c’était mon corps, c’était intime, c’était interdit. Mais je ne savais pas comment le faire cesser. En public, je n’étais rien, c’était verbalement qu’il me dégradait. En privé, dans les couloirs inoccupés, dans les toilettes, il était le maître de mon corps, il se l’est approprié. Il faisait ce qu’il voulait de moi.
Je ne pouvais pas me plaindre. Je n’avais pas le droit. C’était à moi de poser les limites, c’était de ma faute. Et puis, estime-toi heureuse qu’un garçon s’intéresse enfin à toi ! Tu es sûre que tu n’exagères pas un peu, il n’arrête pas de dire que tu es moche !
Personne n’a écouté, personne n’a compris. La violence, je ne la tournais pas vers lui, mais vers moi. Je me coupais du monde. Je coupais tout court. Tu n’es rien, tu es sale.
C’est toi le monstre. Tu l’incites. Tu ne peux plus l’arrêter. C’est toi la fille, la pauvre.
Qu’est-ce qui est le plus dur, sa violence à lui, ou celle des autres ? À moins que ça ne soit cette culpabilité qui est toujours là, ces pensées qui reviennent dès qu’on me parle de « filles faciles » ?
Tout cela à la fois. Il m’a fallu du temps pour comprendre qu’il y avait un problème.
Qu’il avait un problème.
C’était il y a six ans, Que des attouchements, mais c’est toujours là. Ma faute.
Roussette
Cinq ans plus tard, Roussette / Nymphe déclare : « J’ai trouvé des allié·e·s et je n’ai plus arrêté de me battre. »
Illustration par Myroie