La réalité qu’on met à distance. Le masque sur les souvenirs, l’éloignement des témoins de l’époque. Comme si ça n’avait pas existé. Ce n’est pas vrai, personne ne peut le dire. Jusqu’à ce que, bam, dans ta face, c’était vrai, elles l’attestent. Bam, dans ta face, ta peau se rappelle de tout. Bam. Dans ta face. Abattement, pas d’autre mot. Faut réapprendre à vivre avec cette réalité effacée. Dans ta face. Peux plus nier. Peux plus fuir. C’est coincéeétouffée dans ces souvenirs qu’il faut réapprendre à marcher. Le sourire et le rire sont les plus délicats à apprivoiser une nouvelle fois. Ils n’existent plus, dans cette bulle de larmes. Ils n’existent plus, maintenant que la lumière se fait. Et la coïncidence des dates. Il n’y a pas de hasard, toujours aux moments anniversaires que des souvenirs reviennent. Une odeur. C’était torture, ce jour-là, la coiffeuse portait ce parfum. Et toi impuissante, embaumée, au milieu de ce cirque. Continuer à prétendre que tout va bien. Que dire ? Va changer de parfum, tu me rappelles cette chambre étouffante ? Ce n’est pas convenable. Tu te tais. Tu contrains le visage à sourire. Rien ne transparaît. Tu te tais. Tu sais faire que ça, non ? C’est fou, ces coïncidences de dates, alors que plus rien n’existait. Pour de vrai, tu n’as que des approximations, rien de précis, parce que tout oublié. Comme si tu avais déchiré les papiers qui ramènent à toi ces événements. D’ailleurs… tu les as déchirés. Ça n’a pas existé. De la force du déni. Maintenant, tu attends la joie promise après la peine. Tu fais comme si, mais, en vrai, tu sais que tu peux toujours courir, c’est pas pour demain. Dans ta face la réalité. Plus aucune sortie de secours. Deal with it.
Stéphanie
Illustration par Emilie