Hier soir je suis rentrée de soirée, seule, comme une grande fille. Il était 4h du matin, j’ai pris le Noctambus par soucis d’économie et de rapidité. J’écoutais ma musique, j’étais posée, je regardais par la fenêtre.

Puis quatre hommes de 25/30 ans montent dans le bus. Ils s’assoient dans le carré à côté de moi. Ils parlent, rigolent, font leur vie. À un moment donné, l’un d’entre eux s’avance dans mon carré, face à moi, et me dit « coucou !! », je ne relève pas. Il me dit « tu veux pas parler ? » donc je réponds que non, merci mais je ne désire pas parler. Mon visage est froid, un poil dur mais pas agressif. Là, monsieur regarde ses copains et dit « mais je fais ce que je veux en fait ! » tout en se rapprochant très très fortement de moi. À ce moment précis, monsieur ose la chose qu’il n’aurait jamais dû faire. Il faisait alors rire ses copains, comme si effrayer une jeune femme seule dans le bus la nuit était super fun, comme si ça pouvait leurs procurer un peu d’adrénaline. Il ose donc poser une main sur ma cuisse droite. Il n’aurait jamais dû.

Je n’ai rien calculé, j’ai juste eu toute la haine que je peux avoir envers ces hommes qui se pensent tout permis, qui me prennent pour un bout de viande, au quotidien, dans la rue. Qui jugent ma façon de m’habiller, comme une provocation ; en jogging, en slim, en short, en robe, tout est provocation et tout est une excuse pour faire chier et se permettre de juger, apeurer, violenter et violer.

Je n’ai eu qu’une seule réaction : lui adresser une droite bien placée dans la mâchoire. Bien entendu j’étais assise, je n’avais pas de recul et la droite est parti de façon très spontanée sans que je puisse vraiment gérer mon coup. Mais je l’ai sonné. Monsieur est tombé en arrière, il avait la bouche en sang et surtout, il a hurlé « mais elle est baisée !!!! » Ses potes avaient une tête apeurée. Je suis restée assise, le visage fermé, l’œil toujours noir, la mâchoire serrée, et les poings prêts à une deuxième distribution. Mon cœur battait vite, très vite. Là, deux autres mecs, présents depuis le début, ont pris la décision de les virer du bus. Le trajet a continué, personne ne m’a parlé, personne n’a relevé mon geste. J’étais la seule fille, je n’étais pas fière. Puis mon arrêt, je suis rentrée chez moi. Il m’a fallu 1h30 pour redescendre et trouver le sommeil.

Maintenant je cogite : si je n’avais pas réagi, que m’aurait-il fait « pour rire » ? Depuis quand faire peur et menacer fait rire ?! Qui sont-ils pour penser pouvoir prendre le contrôle de mon corps, communiquer avec moi sans me demander mon avis ? Qui est le plus baisé de l’histoire ? Celui qui agresse ou celle qui se défend ? Je suis heureuse d’avoir réussi à me défendre, d’avoir appliqué mes cours de boxe pris il y a quelques années. Mais je suis moins heureuse d’avoir dû taper un homme pour me protéger, et d’avoir eu si peur.

Aujourd’hui il doit avoir mal à la mâchoire, et doit dire au monde entier qu’il s’est battu avec un con à la fin de la soirée. Mais il doit se sentir mal au fond d’avoir été sonné par une femme parce qu’il a osé lui manquer de respect.

Alors non, tu n’as pas le droit de faire ce que tu veux. Non je ne suis pas ta chose. Non je ne suis pas ton casse-croûte de fin de soirée. Quand je dis « non » ça ne veut pas dire oui. Et Oui nous t’emmerdons, mon short, ma fierté et moi.

B.

Illu - J'AI DIT NON

Illustration par Shyvs

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