Je suis étudiant. Ma mère vit seule, et je rentre la voir une fois par mois. Bizarrement, depuis que je la vois moins souvent, on se parle plus.
Le mois dernier, on regardait l’interview d’Aline Rigaud dans l’émission Sept à Huit, qui témoignait de son agression sexuelle. Et ma mère, tout le long de l’interview, fait des “Mouais…”. Elle m’explique finalement qu’elle aussi a connu des mains baladeuses de collègues, des tentatives de baisers entre deux portes, et qu’elle détestait ça, mais qu’il ne “faut pas exagérer”.
Puis elle conclut par le fait qu’un type avait tenté de la violer quand elle était ado. Qu’il l’avait bloquée dans un coin et commençait à se déboutonner, mais qu’elle avait pu s’enfuir. Et que ça, elle en gardait quand même “un mauvais souvenir”.
J’étais scié. A la fois par sa solidité, et en même temps par l’intolérable tolérance dont elle faisait preuve.
Maintenant, je me demande : combien de femmes autour de moi ont pu vivre ça sans jamais en parler ? Ne rien dire, non pas parce que c’est trop éprouvant, mais parce qu’on trouve ça normal.
Muchos
Illustration par Léo
A noter que se dire que “c’est normal”, cela fait parti des (mauvais) moyens dont notre esprit se protège. Parce que si nous devions reconnaitre avoir subit une agression, cela nous détruirait. C’est du moins ce que j’en pense pour avoir vécu une agression durant laquelle me esprit me répétait en boucle “ce n’est rien, ça doit être normal”…. C’est un mécanisme de défense.