J’avais six ans. Peut être sept. Je ne me souviens plus très bien de ce jour où j’ai découvert que je pouvais éprouver du plaisir en frottant mon sexe à un objet. Je ne me souviens plus comment cette idée a pu traverser mon esprit, ce qui en a été le déclencheur, l’envie.
À ce jeune âge, j’ai découvert que si je coinçais une porte ou même un poteau entre mes jambes, que j’appuyais mon sexe contre ceux-ci tout en faisant des mouvements réguliers de bas en haut je pouvais ressentir du plaisir. Sauf qu’à l’époque, je ne savais pas ce que c’était. Je ne savais pas ce qu’était le plaisir sexuel, l’orgasme, la jouissance. Je sentais juste cette sensation de “petits papillons” comme j’aimais l’appeler, dans mon ventre et dans mon sexe. Ma culotte se retrouvait souvent mouillée après cet exercice et je ne savais pas pourquoi, je ne me posais de toutes façons pas la question.
Je ne l’ai compris que bien des années plus tard mais cet acte était comme une drogue pour moi. À chaque fois que j’avais réussi à jouir, il fallait absolument que je recommence. Il fallait que je le fasse plusieurs fois par jour, mais toujours dans la plus grande discrétion. Car oui, ma mère savait que je faisais cela, elle m’avait surprise à plusieurs reprises… Et à chaque fois qu’elle me voyait en pleine action elle me disait du haut de son mètre quatre-vingt et avec ce regard plein de honte, d’arrêter immédiatement de me “pendre”. Elle appelait ça ainsi.
Alors je descendais et je reprenais mon petit plaisir à un autre moment de la journée, lorsque j’étais sûre ou presque de ne pas me faire voir.
Mais c’était pour moi à chaque fois une frustration extrême de devoir m’arrêter avant d’avoir pu ressentir ces “papillons” dans mon corps.
J’ai fait ça durant des années. C’était tabou dans ma famille. Le genre de truc dont les parents ont honte, le genre de truc qu’ils ne comprennent pas et ne cherchent pas à comprendre. Le genre de truc qui vous force à aller voir une psychologue…
Puis un jour, en grandissant, j’ai arrêté. Cette envie m’est passée. Je n’y pensais même plus. C’est à cette période que j’ai découvert la sexualité. Et c’est à cette période que j’ai remplacé ce moment intime avec un objet, par un moment intime avec ma main, le soir dans mon lit avant de dormir. Je m’étais rendue compte que si je positionnais ma main sur mon sexe, et que à l’aide de quelques doigts je faisais des mouvements plus ou moins circulaires, je pouvais à nouveau ressentir la même sensation que quand j’étais gamine. Mais je n’arrivais jamais à atteindre le moment de l’extase.
J’ai fais ça durant des années également. Tout en continuant à entretenir ma vie sexuelle d’adolescente. Et jamais au cours d’une relation intime avec un homme je n’ai réussi à ressentir ce plaisir. Je ne comprenais pas vraiment pourquoi… Je me demandais si c’était normal, si mon sexe n’avait pas un problème… Mais en fait, ce n’était pas moi le problème.
J’ai aujourd’hui 20 ans, et depuis un peu plus d’un an je m’intéresse fortement à la sexualité des femmes. À nos corps et nos envies. C’est alors que j’ai enfin tout compris. La lumière s’est allumée !
J’ai compris que durant toutes ces années ce que je faisais n’était pas mal ou dégoutant, et n’avait pas non plus lieu d’être honteux. J’ai compris que même à un jeune âge, je recherchais le plaisir parce que j’avais inconsciemment compris comment l’atteindre. Je découvrais mon corps et plus particulièrement mon sexe. Je pratiquais la masturbation sans même le savoir.
Et c’est alors qu’un soir en regardant pour la troisième fois le film La vie d’Adèle que j’ai décidé de me masturber pour atteindre l’orgasme. Je n’y étais encore jamais arrivée auparavant. Et ce soir là, ça a été la révélation. J’ai ressenti par le simple biais de mes doigts et de mon imagination un plaisir que je n’avais pas eu depuis longtemps : j’ai joui.
Et mon dieu que c’était bon !
Aujourd’hui je ne peux plus me passer de ce moment avec moi-même. Parfois, l’idée que je suis accro, que c’est maladif, me traverse l’esprit. Mais je me rassure vite et je combats ces paroles en me disant que non, c’est tout ce qu’il y a de plus normal. Avoir besoin et envie d’éprouver une jouissance est légitime et toutes les femmes devraient se faire plaisir ainsi. Toutes les femmes devraient se masturber le jour, la nuit, sous la couette ou sous la douche, juste parce que ça fait du bien et parce que c’est le meilleur moyen de connaître son corps et ses zones sensibles.
À l’heure où j’écris ce témoignage, je peux vous affirmer que ma sexualité n’en est que plus reconnaissante. Je sais comment éprouver du plaisir avec mon/ma partenaire, je sais quelle partie de mon anatomie toucher pour déclencher un orgasme. Je peux aiguiller mon/ma partenaire plus facilement. Et je peux surtout jouir pleinement !
N’ayez pas honte de vous toucher ou d’être excitée à cette idée. Faites moi plaisir n’ayez pas honte et faites vous plaisir !
La Loba Salvaje

Photographie: Une femme nue, est agenouillée sur un lit recouvert d’un simple drap, accoudée sur la tète de lit noire. Sa chevelure sombre cache son visage tourné vers son épaule droite. Sa main gauche est enfouie dans son entrejambe.
Illustration par La Loba Salvaje