Où conduit donc la folie ?
…Nulle part à priori…
La violence infligée a différentes manières de se répercuter.
J’étais un petit garçon de 8 ans. Cet homme, qui n’était pas mon père, était là, omniprésent. Régulièrement, lorsque je me levais le matin, je voyais le visage tuméfié de ma mère, les coquards et autres marques à force de coups contre l’évier de la cuisine. Et puis il y avait tout ce que je ne savais pas….
Mais ce n’était rien par rapport au reste…
Cet « homme » se proclamait « le fils de cristal »… Tout un programme. Entre deux coups, deux destructions, il disait que j’étais le diable…. Donc selon une logique lui étant toute personnelle, son ennemi. Ou comment l’archétype du malade psychopathe s’est alors retrouvé dans ma vie pendant 3 ans. 3 ans durant lesquels la normalité fut celle-ci : la peur.
La seule personne pouvant avoir un impact sur lui était sa mère… Mais ce n’est pas elle qui nous a sauvés, c’est moi. Il n’a jamais fallu compter sur les flics ou les toubibs, ils en avaient une peur bleue…
Nous avions réussi à le fuir alors qu’il était en voyage, comme souvent. Par une ruse dont je ne me rappelle plus la portée, ma mère avait trouvé le moyen de déménager durant cette période, dans une maison d’une résidence toute neuve… Mais il nous a retrouvés. Je ne sais pas comment.
La peur reprend son cours… Les violences, les cris, l’évier de la cuisine…
Jusqu’à ce jour, un samedi. Il part tôt le matin. J’espère qu’il ne reviendra pas.
Le soir arrive… 19h. Je me souviens. Je regardais un dessin animé dans le salon lorsque je le vois arriver, éméché. Il ne fallait pas qu’il boive, nous le savions… La soirée allait alors devenir un moment où le mot “survie” prendrait tout son sens…
Il rentre donc, et ferme à clé toutes les portes. Il commence à hurler sur ma mère dans la cuisine, à quelques mètres de moi, assis au fond de la salle, essayant de contrôler mon angoisse. Il exige un chèque pour partir… « Qu’il parte !! »
Devant le refus de ma mère, il la saisit par le cou et commence à l’étrangler. Ses pieds ne touchent plus terre… Devant ce molosse d’un mètre quatre-vingt-dix, je me lève, à 11 ans, et fonce vers lui…
Surpris, il la lâche. J’en profite pour attraper sa main en ouvrant la porte de la cuisine qui donne sur le couloir de l’entrée. Elle tombe. Je cours vers la porte, l’ouvre, la clé étant restée dessus… Et me précipite pour hurler au secours dans la rue… Personne ne sort. Je rentre à nouveau dans le couloir, saisis la main de ma mère et parviens à la faire sortir. La porte se ferme.
Nous sommes recueillis par les voisins. Ils ont tout entendu. On entend les cris qu’il pousse, les coups dans les murs… la destruction.
Il faut appeler les flics… Vont-ils faire quelque chose ? Il est trop dangereux… Trop fou…
Nous sommes recueillis par des amis quelques maisons plus loin.
Quand nous y sommes retournés le lendemain, il n’était plus là, mais avait tenté de brûler la maison… Le chaos…
B.L.
Illustration par Emilie Pinsan