Quand j’étais ado, j’avais lu un article dans « Jeune et Jolie » qui parlait des premières expériences sexuelles, et de ce qui pouvait se produire. L’exemple des « femmes fontaines » était cité. Je me souviens que c’était présenté comme quelque chose de rarissime, voire même une légende urbaine.

Il y a trois ans – j’avais alors 34 ans – après un changement de vie assez radical, j’étais en pleine découverte de ma sexualité. Avant cela, elle était assez « normée », très centrée sur la pénétration. Je me suis donc retrouvée dans une période intense de pratiques sexuelles diversifiées, avec différent.e.s partenaires non-exclusif.ve.s.

À ce moment de ma vie, je m’éclate, je prends un plaisir fou, je libère mon esprit : je le laisse s’exprimer comme il a toujours voulu le faire, en incluant mes envies, fantasmes et préférences en matière de sexe, que je sais être kinky, « hors-normes » et plutôt tabou, du moins dans le cercle de personnes que je fréquentais auparavant.

En discutant avec des copines virtuelles, elles aussi en pleine reconstruction de vie, je découvre ce qu’est le squirt, et que toute personne dotée d’organes sexuels féminins peut squirter. Autrement dit, la légende urbaine de la femme fontaine n’en est pas une.

Tuto vidéo à l’appui (oui, oui, ça existe), j’écoute, je regarde, je lis, j’apprends, et je mets en pratique. J’ai toujours eu une bonne connaissance de mes organes génitaux, externes et internes, alors l’exploration et les expériences ne me font pas peur.

J’ai passé plusieurs soirées, seule, à explorer mon intimité, à la stimuler, à écouter les réactions de mon corps pour déceler les nouvelles sensations.

Et puis, un soir, j’inonde mon lino. Quelle joie ! Cette sensation fantastique de libération et d’explosion, tellement nouvelle mais aussi familière, comme si mon corps savait, et avait simplement attendu que je daigne lui accorder un espace pour l’expression de sa jouissance à l’extérieur de mon corps et non plus seulement à l’intérieur. Je réalise alors à quel point le plaisir féminin est intériorisé – comme à peu près tout ce qui concerne les femmes dans notre société.

Je sais que je peux le faire, que ça fonctionne, alors je passe à autre chose, à d’autres expériences.

Je rencontre A., qui deviendra mon amoureux actuel. Pour la première fois, j’ai un partenaire sexuel qui met un point d’honneur à me donner du plaisir, même si c’est en décalage ou en dehors de sien. Après quelques semaines à se découvrir l’un l’autre, nous commençons à savoir ce qui fonctionne ou pas, ce qui nous fait décoller, ce qui nous transporte et nous ravit.

Un jour, après un échauffement bien SM, il insiste particulièrement sur certaines zones avec ses doigts, et là… Me voici devenue source et geyser à la fois. Depuis ce jour, je squirte presque systématiquement, qui que soit mon/ma partenaire, même si A. est la personne qui connait le mieux le chemin pour m’y emmener. Comme si mon corps, à force d’entrainement et d’apprentissage, avait intégré cette façon de manifester du plaisir.

Je dois dire que, sans que ce ne soit mon unique façon d’avoir un orgasme, quand je squirte, c’est vraiment une sensation à part. C’est comme une marée, qui monte inexorablement, puis les digues se rompent subitement, et tout est inondé : mon cerveau, mon corps, mon sexe, le lit, les draps, mon amoureux… Inondés de joie, d’exaltation, d’euphorie et de liquide, me laissant sans force, tremblante, sidérée, et dans une plénitude bienheureuse.

C’est une sensation extraordinaire. J’ai le sentiment d’avoir libéré mon esprit et mon corps, de leur avoir offert l’entièreté de leurs terrains de jeu en terme de jouissance sexuelle. C’est très satisfaisant, très galvanisant aussi, je me sens plus femme, plus indépendante, je sais que mon orgasme peut déferler, physiquement !

Je jouis de jouir ainsi. C’est comme une mise en abîme, un orgasme dans l’orgasme.

Ad.

Dessin aux traits noirs, partiellement coloré : une plante aux longues feuilles tombantes dessinée en noir et blanc occupe toute la hauteur de la page. Les feuilles de la partie centrale sont colorées d'un fond rose pale et de taches roses plus foncées. Au milieu est dessinée une main bleue, l'index et le majeur tendus et les autres doigts repliés.

Dessin aux traits noirs, partiellement coloré : une plante aux longues feuilles tombantes dessinée en noir et blanc occupe toute la hauteur de la page. Les feuilles de la partie centrale sont colorées d’un fond rose pale et de taches roses plus foncées. Au milieu est dessinée une main bleue, l’index et le majeur tendus et les autres doigts repliés.

Illustration par N.O.