Asnières-sur-Seine, les années 90, tout était possible.

Acheter mon appartement à 24 ans, je l’avais fait. Voyager, avec ou sans papiers, je l’avais fait.

Me révolter face à la police une police répressive. Les gardes à vue… fait.

J’ai accumulé les expériences à la limite de délinquance.

Je buvais du J.B du matin au soir, en l’accompagnant de son ami pilon, donc j’étais toujours fière d’être la meilleure acheteuse (on parle bien qualité/prix) .

Mes nuits duraient trente-six heures, j’enchaînais huit heures de travail. À l’époque, on faisait du trente-neuf heures par semaine ou quarante-deux, même, voire soixante, en restauration.

Bref… Mon cerveau accumulait toutes ces barres de rire, ces délire, ces retrouvailles entre amis et surtout, aussi, les malheurs. Les viols, les agressions, qu’elles soient verbales, physiques… Simplement le fait d’avoir été bannie 20 ans de chez ma famille parce que, oui je suis sortie avec un juif et oui, je bois et oui, je fume.

Alors, un jour, assise sur un banc à ma pause déjeuner, je me suis fait un joint et me suis posé la question. J’étais à La Défense, dans un parc un peu caché avec une vue sur Paris.

L’heure du bilan était arrivée. Tout a basculé ce jour là.

J’ai décidé de mettre mon cerveau entre les mains d’une psychiatre – que je juge maintenant avec le recul plus que défaillante.

Elle m’a gavée d’antidépresseurs, de Rohipnol, de somnifères, Lexomil, Valium, Xanax… tous ces médicaments dans la même ordonnance pour un mois dans les mains d’une jeune fille de 25 ans, alcoolisée et sous shit.

Concrètement, elle me refilait plus de drogue gratuite, remboursée par la sécurité sociale.

Je l’ai payée, et je l’ai payé cher. Non seulement pour ses consultations à 60  – je ne me souviens plus si c’était des francs ou des euros tellement mes neurones m’ont quittée – et surtout, j’ai perdu l’usage de la parole pendant six longs mois.

La psychiatrie oui. Mais avec qui ?

Amel C.

 

Illustration par Spissy