Je voudrais écrire sur ce que ça fait d’être une femme lambda sous un régime patriarcal (autant prévenir tout de suite : ça fait mal).

Mais aussi sur ce qui m’a permis de me libérer (ou du moins d’être en voie de le faire) de la sexualité normée.

La sexualité normée : hétérosexuelle, où la femme est passive.

Celle qui fait que des mecs se sont crus autorisés à :
– me toucher le cul
– m’embrasser de force (je me souviens de sa langue – c’est une horreur)
– penser que je leur devais du sexe et agir en conséquence
– etc.

Je n’ai jamais été très douée pour dire « non » fermement. Du coup, de chaque agression, je garde de la culpabilité.

Mon premier rapport sexuel a été terrible. J’étais très jeune, le mec était nettement plus âgé. Il a insisté jusqu’à ce que je cède. Certaines théories féministes disent que ce genre de configuration, c’est un viol. Je ne sais pas, ça me semble un peu exagéré, mais au fond ça n’a peut-être pas trop d’importance. Mais ensuite, il y a eu les cauchemars, de viol, pour le coup. Pendant des années. Parce que j’ai peur. Des hommes. C’est vrai. Parfois j’ai la sensation de porter chaque viol en moi et c’est une torture. Il y a eu donc cette entrée difficile dans la sexualité, et toutes ces agressions que chaque femme vit dans sa vie, qui nécessairement rendent les choses compliquées.

Mais ensuite j’ai découvert le polyamour (j’étais toujours tombée amoureuse de plusieurs personnes en même temps ; je ne savais pas que ça avait un nom) et j’ai exploré ma sexualité lesbienne. Ça m’a fait beaucoup de bien, ça m’a beaucoup libérée, donné de l’assurance, soulagée. Depuis, je vis ma vie amoureuse et sexuelle de manière beaucoup plus légère qu’auparavant. Souvent les gens pensent que le polyamour, c’est un truc inconséquent, un truc de jouisseurs-euses (quand bien même ça le serait, tant que tout le monde est consentent, je ne vois pas le problème). Pour moi c’est surtout un moyen de créer des liens très forts, très honnêtes et très libres. Et ça me rend heureuse.

A.L.

 

Dessin au feutre bleu sur feuille blanche : un corps de femme nue sans bras et qui s’arrête au-dessus des genoux, elle a un cour dessiné sous l’œil gauche, sur son cul, un avant-bras. Derrière elle, un autre morceau de buste avec sept dessins de cœurs sur la gorge et dont le visage est caché par l’image d’un autre visage entrain de l’embrasser, à la place des cheveux il est écrit “BOUM !”. Les corps sont entourés d’arabesques.

Illustration par Aude Soret