Pendant un peu plus d’un an, j’ai “souffert” de vaginisme. Je ne comprenais pas comment il m’était impossible de coucher, alors qu’à mes 17 ans, on avait réussi à obtenir la même chose de moi.

Je n’étais pas prête. J’étais dans une relation “secrète” avec un homme un peu plus âgé que moi. J’étais jeune, perdue, à l’étranger. Sa copine officielle vivait dans une autre ville, c’était moi qui la remplaçait. Ne pensant qu’à lui, il me mit la pression. Sur environ cent “non”, j’ai peut-être cédé cinq fois tout au plus. J’en garde très peu de souvenirs, ce qui ne m’a pas empêché de voir des cauchemars de lui ou de me réveiller la nuit en pleurant des années après. Je restais allongée, le laissais faire. Je suis presque sûre de ne pas l’avoir touché, il faisait tout.

J’y mis fin trois mois plus tard. Dans l’année qui suivit, j’expérimentai avec quelques autres mecs. Ma première fois m’ayant été extorquée, je ne savais plus où se situaient mes limites. Je faisais ce que je me pensais être “supposée” faire, que le désir y soit ou non, puisque de toutes façons “le mal était fait”. Ce que je n’avais pas fait avec l’autre, je l’appris sur le tas. Mais à chaque fois, excitée ou non, au moment d’être pénétrée par un sexe, je me fermais. Il était totalement impossible de coucher à ce niveau-là.  Sur le moment, je le vivais comme une trahison de mon propre corps, qui aurait dû réagir de cette façon avec l’autre, pas alors que je “voulais” le faire ! Mais en même temps, j’étais comme soulagée : puisque j’étais incapable cérébralement de savoir ce que je voulais, si je le voulais et quand, mon corps prenait le relais et me protégeait. Un peu tard, certes, mais il me protégeait.

Ce n’est qu’à mes dix-neuf ans que le vaginisme cessa : c’est alors qu’eut lieu ce que j’appelle ma “vraie première fois”, avec une personne dont j’étais à l’époque persuadée d’être amoureuse, à mon rythme. Il avait beau être un monstre sur d’autres points, j’ai quand même découvert que j’aimais le sexe, que mon vagin n’était pas “anormal”, et que je n’étais pas “frigide” – j’étais également dépourvue jusqu’alors de sensations à cet endroit dès qu’un homme y touchait.

J’ignore s’il existe forcément un lien entre vaginisme et abus sexuels, mais dans mon cas précis j’y vois sans aucun doute un lien de cause à effet. Bien que par la suite j’aie de nouveau été victime de tels abus, je ne me suis plus fermée de la sorte.

 

– Not your baby

Illustration par FFC.

Illustration par FFC.