Samedi 21 novembre 2015

Une semaine. Et une nuit. Déjà. À nouveau. En pire. S’il est possible d’établir ce genre de hiérarchie inepte. À nouveau. Des morts. Des vies parties en fumées. Au hasard cette fois. Quoique. Ces vies avaient un sens. C’est bien ce qui posait problème. Une violence extrême. À nouveau. Des visions insoutenables. Émergence brutale des ténèbres éteignant toute source de lumière en une fraction de seconde.

Nouveauté. Cette fois, ces morts, j’aurais pu en faire partie. Véritablement. Objectivement.

Autre nouveauté. Plus ou si peu d’excuses ou de justifications. Enfin. Désespérant d’avoir dû en arriver là mais peu importe. L’union, le lien entre toutes ces âmes perdues que nous sommes devenues ce vendredi 13 est désormais possible. Il se construit. Sous nos yeux. Dans notre chair.

C’est vrai, ces morts ne valent pas plus que celles de l’autre bout du monde. Personne de sensé n’émettrait une idée aussi stupide. Mais ils sont à nous. Ils sont nous. Car nous sommes ce pays. Qui a une histoire aussi effrayante qu’éblouissante. Mais qui a un sens. Qui est toujours présent en chacun d’entre nous. Sans même que nous en ayons conscience.

Pointe d’espoir dans cet univers obscur.

Et maintenant ? On fait quoi ? On attend le prochain ? Péniblement ou indifféremment ? Ou on lutte ? Pour retrouver ce qui nous rassemble. Pour que la fraternité ne soit plus un mot vide de sens. On apprend l’empathie. Ou on la réapprend. On apprend aussi l’indulgence. Pour nous-mêmes. Pour ce pays à qui nous reprochons tant, à qui nous reprochons tout. Son passé sanglant, son présent apathique et son avenir désespéré.

Indulgence ne signifie pas indifférence. Notre histoire emplie de taches indélébiles est une réalité tout aussi indélébile. Cessons à la fois de l’ignorer et d’en payer le prix. Essayons plutôt de nous en emparer, de le regarder en face, de l’admettre pour enfin nous en distancier. La fiction, le récit, l’expression artistique sont les meilleurs outils pour y parvenir.

Notre présent peut être transformé à tout instant. Il ne tient qu’à nous. Notre avenir n’en sera que l’aboutissement. Construire ou détruire. S’unir ou se désunir. Subir ou agir. Voilà les choix cruciaux qui s’offrent à nous, là, maintenant. Rien n’est écrit.

Nous avons en nous les germes qui nous permettront de relever la tête. De rester debout. De retrouver du sens au milieu de ce vide. De construire, de créer, pas à pas, ce nouveau chapitre.

                                                                                                                      Florence

Photo : Gros plan sur un ensemble hétéroclite de fleurs, d’une tête de mort, un oeil et des araignées en plastique.

Illustration par Carolyne Missdigriz
https://missdigriz.com