J’ai pas choisis de naître avec un vagin et un clitoris. J’ai pas choisis d’avoir ce visage et ce corps qui plaît aux hommes. Lors de notre conception nous n’avons pas le pouvoir de choisir notre destin. Combien de fois je me suis posée cette question “Pourquoi je ne suis pas un homme ?”. Non pas que je ne sois pas fière et désireuse d’être une femme, bien au contraire j’en suis pleinement satisfaite mais j’ai plusieurs fois au cours de ma vie eu envie d’être dans le corps d’un homme pour ne plus avoir à subir le fait d’être une femme.
Subir ces regards insistants quand tu marches dans la rue. Subir ces réflexions machistes et déplacées. Salaces. Vulgaires. Subir ces sifflements. Le klaxon d’une voiture. Subir ces sourires pervers dans les transports en communs. Et ces mains baladeuses. Subir cette peur de rentrer seule la nuit. Subir l’angoisse quand je voyage seule durant plusieurs mois. Subir le fait de porter une mini-jupe. Une robe. Un short. Un collant. Subir cette phrase qui ressort souvent “Elle est habillée comme une pute faudra pas s’étonner si elle se fait violer”. Subir. Et encaisser. Ne rien dire.
Car oui, pendant des années je n’ai rien dis. J’entendais, je voyais, je sentais mais je ne réagissais pas. Je n’osais pas. J’avais peur mais de quoi ? Peur de me faire frapper, de me faire agresser, de m’imposer, de ne pas être assez forte pour contrer les réflexions de ces hommes fiers d’être comme ils sont, de ces hommes qui te prennent pour une chose.
J’avais peur de tout ça. Et puis un jour…
Un jour j’ai décidé que c’était trop. Parce que ce jour j’ai une fois de plus eu peur de me rebeller, de m’affirmer et de dire non. Ce jour où cet homme m’a forcé à lui faire une petite gâterie alors que je ne voulais pas. Alors que je pleurais et criais. Ce jour est à la fois le pire de ma vie et le meilleur. Paradoxe.
Depuis j’ose. Je ne me gêne plus et je n’ai pas honte. Je n’ai pas peur. Je marche sereinement dans la rue, tout en étant sur mes gardes. Je n’ai plus honte de m’habiller comme je veux et non pas comme les gens aimeraient. Je défie du regard les hommes qui me regardent avec insistance. Je réponds à ceux qui me sifflent, m’insultent, et me draguent lourdement.
Et je n’hésite plus à prendre la défense de ces filles qui n’osent pas, qui se taisent. Je prends leur défense avec envie et plaisir, par entraide, parce que moi aussi à l’époque j’aurais aimé que quelqu’un prenne ma défense et parce que quand je les vois, c’est comme un miroir. Un miroir qui reflète celle que j’étais. Cette jeune fille qui se laisse faire parce qu’on doit pas ouvrir trop grand la bouche. Parce qu’on doit pas riposter aux comportements déplacés des hommes. Parce qu’on doit faire attention. Parce qu’on a pas de couilles alors on ne peut pas prendre son courage à deux mains et rétorquer. Mais sachez que même sans couilles, on a des ovaires et grâce à eux on peut être bien plus courageuses et bien plus fortes que ceux qui n’en ont pas.
Être une femme n’est pas une fatalité. Être une femme ça ne veut pas dire être inférieure. Être une femme c’est être l’égale de l’homme.
La Loba Salvaje

Photo en noir et blanc : deux jambes tendues, vues du dessus. Au fond un radiateur sur lequel sont posés les pieds. Des jambes nues, de femme. Elle porte des chaussettes noires et un mini-short noir. Sur ses jambes, tracé au pinceau, en gros et gras, en noir : NO MEANS NO.
Illustration par La Loba Salvaje